Santé mentale des enfants et des jeunes en Europe : un enfant sur sept concerné, des soins encore trop fragmentés

Santé mentale des enfants et des jeunes en Europe : un enfant sur sept concerné, des soins encore trop fragmentés
Santé mentale des enfants et des jeunes en Europe : un enfant sur sept concerné, des soins encore trop fragmentés

Le 11 novembre 2025, le bureau régional européen de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) a publié un rapport majeur intitulé « Child and youth mental health in the WHO European Region. Status and actions to strengthen quality of care ». Selon le Dr Hans Henri P. Kluge, directeur régional de l’OMS pour l’Europe, « la santé mentale des jeunes doit être reconnue comme une urgence de santé publique ». Cette étude constitue la première évaluation d’ensemble de la santé mentale des enfants et des adolescents en Europe, couvrant les 53 États membres de la Région européenne. Le constat est préoccupant : les troubles psychologiques et émotionnels augmentent rapidement, tandis que les systèmes de soins demeurent insuffisants, fragmentés et inégalement répartis.

Au-delà des chiffres, ce rapport met en lumière l’ampleur des défis à relever : stigmatisation persistante, manque de politiques adaptées et besoin urgent de coordination entre les différents acteurs du soin. L’OMS insiste également sur le rôle déterminant des politiques publiques dans la prévention :

Les jeunes ont besoin d’espaces sûrs, d’écoute et de ressources accessibles dès les premiers signes de mal-être.

OMS

En d’autres termes, il ne s’agit plus seulement de soigner, mais de prévenir activement.

Une prévalence alarmante de troubles psychiques chez les jeunes

L’OMS révèle qu’un enfant ou adolescent sur sept souffre d’un trouble de santé mentale en Europe. Cette proportion, déjà élevée, a augmenté d’un tiers en quinze ans. Chez les adolescentes de 15 à 19 ans, une sur quatre est concernée. Le rapport souligne que « les jeunes filles présentent aujourd’hui un risque accru de troubles dépressifs et anxieux », conséquence directe des pressions sociales et scolaires. Le suicide reste la première cause de mortalité chez les jeunes âgés de 15 à 29 ans, illustrant l’ampleur du mal-être adolescent.

Les troubles les plus fréquemment observés incluent la dépression, l’anxiété, les troubles du comportement alimentaire, mais aussi les addictions numériques. Selon le rapport, ces pathologies se manifestent de plus en plus tôt, parfois dès l’école primaire. Les données recueillies montrent également une forte corrélation entre la précarité, le harcèlement scolaire et la détérioration de la santé mentale.

L’environnement dans lequel un enfant grandit influence profondément son équilibre psychologique.

Précise le Dr Natasha Azzopardi-Muscat, directrice de la division Santé publique de l’OMS/Europe

Ces constats invitent les États à renforcer les dispositifs de dépistage, d’accompagnement scolaire et de soutien familial.

Des services de santé mentale pour enfants encore insuffisants et inégaux

Le rapport met en évidence de fortes disparités entre les pays. Dans un quart des États, aucun service communautaire n’est spécifiquement dédié à la santé mentale infantile et adolescente. Un pays sur cinq ne dispose d’aucune politique nationale ciblant cette population. Dans certaines régions, on ne compte qu’un psychiatre pour 76 000 jeunes.

Trop d’enfants n’ont toujours pas accès à des soins psychologiques de qualité à proximité de chez eux.

Précise l’équipe du rapport de l’OMS

Ce manque de moyens humains et matériels engendre des parcours de soins longs, complexes et souvent décourageants pour les familles. De nombreux jeunes passent par des services d’urgence pour des troubles qui pourraient être pris en charge en amont. L’OMS souligne aussi que la qualité des soins varie considérablement d’un pays à l’autre. Les services existants sont fréquemment fragmentés, mal coordonnés entre les secteurs éducatif, médical et social, et rarement centrés sur les besoins réels des enfants et adolescents. « Nous avons besoin de systèmes intégrés qui placent les jeunes et leurs familles au cœur du processus de soin », recommande l’OMS. Le rapport préconise également de promouvoir des programmes de santé mentale dans les écoles afin de repérer plus tôt les signaux d’alerte et d’encourager la résilience.

Les facteurs de vulnérabilité de la santé mentale des jeunes

Plusieurs facteurs contribuent à la dégradation de la santé mentale des enfants et adolescents. L’OMS cite la multiplication des sources de stress, crises économiques, pandémie, instabilité géopolitique, isolement social et surexposition aux écrans. « Les jeunes grandissent dans un environnement saturé d’informations et de pressions sociales », indique le rapport, ajoutant que cela « fragilise leurs capacités d’adaptation émotionnelle ».

Les enfants les plus vulnérables sont souvent ceux confrontés à des environnements familiaux instables ou à la pauvreté. L’insécurité alimentaire, le manque d’accès à des activités culturelles ou sportives et les violences intrafamiliales constituent autant de risques aggravants. L’OMS insiste aussi sur le rôle des réseaux sociaux, s’ils offrent un espace d’expression, ils favorisent également la comparaison, l’isolement et la baisse de l’estime de soi. L’organisation rappelle que « la prévention passe par une éducation à l’usage responsable des technologies et par une écoute active du ressenti des jeunes ».

À cela s’ajoute le cloisonnement entre les systèmes de santé, d’éducation et de services sociaux, qui freine la continuité des prises en charge. L’organisation souligne également le manque d’implication des jeunes et de leurs familles dans la conception et l’évaluation des dispositifs de soins. Enfin, la formation des professionnels reste insuffisante : nombre d’entre eux ne disposent pas des compétences nécessaires pour répondre aux besoins spécifiques liés à la psychologie de l’enfance et de l’adolescence. « Former les professionnels à écouter et à comprendre les jeunes est l’un des leviers les plus puissants de prévention », insiste l’OMS.

Les neuf actions prioritaires recommandées par l’OMS

Pour remédier à cette situation, l’OMS/Europe propose neuf actions clés :

  1. Élaborer des plans nationaux de santé mentale centrés sur les jeunes.
  2. Allouer des financements dédiés à la qualité des soins.
  3. Définir des normes et protocoles communs à l’échelle européenne.
  4. Mettre en place une évaluation continue de la qualité des services.
  5. Adapter les modèles de soins aux besoins spécifiques des enfants et adolescents.
  6. Impliquer activement les familles et les jeunes dans les décisions.
  7. Renforcer la formation et le nombre de professionnels.
  8. Mesurer des indicateurs centrés sur le bien-être et la satisfaction des jeunes.
  9. Favoriser le partage de données et de bonnes pratiques entre pays.

Santé mentale des jeunes : quelles implications pour la France ?

La France partage les constats dressés par l’OMS. Les délais d’attente pour consulter un pédopsychiatre restent longs, les structures publiques sont saturées et les dispositifs de prévention encore insuffisants. « Le modèle français doit évoluer vers une approche intégrée, accessible et continue », souligne le rapport.

En France, un enfant sur dix présenterait un trouble psychique nécessitant un suivi, mais seule une minorité bénéficie d’un accompagnement adapté. Le manque de coordination entre les services de santé scolaire, hospitaliers et associatifs freine la mise en œuvre d’une stratégie globale. Les acteurs de terrain appellent à la création de passerelles entre l’Éducation nationale et les professionnels de la psychologie, afin de dépister plus tôt et d’éviter la chronicisation des troubles.

Le rapport de l’OMS met aussi en avant la nécessité de donner plus de moyens aux initiatives locales : maisons des adolescents, plateformes d’écoute, programmes d’éducation émotionnelle. Ces structures de proximité jouent un rôle crucial dans la prévention, mais restent trop peu nombreuses et inégalement réparties sur le territoire. « Chaque pays doit veiller à ce qu’aucun jeune ne soit laissé sans soutien face à la détresse psychologique », rappelle l’OMS.

Agir pour la santé mentale des enfants et adolescents en Europe

Un enfant sur sept vit avec un trouble de santé mentale dans la région européenne. Ce chiffre ne doit pas être une statistique de plus, mais un appel à l’action.

Conclut le rapport de l’OMS/Europe

Ce rapport de l’OMS/Europe constitue à la fois un avertissement et une feuille de route. Il rappelle que la santé mentale des jeunes doit devenir une priorité politique et sociétale majeure. « Nous savons ce qu’il faut faire, il faut maintenant agir », conclut le Dr Kluge. Les neuf actions proposées peuvent inspirer des réformes ambitieuses en France et ailleurs, afin de garantir à chaque enfant un accompagnement psychologique accessible, continu et bienveillant.

L’OMS plaide pour une vision à long terme, la santé mentale des jeunes ne se limite pas à la thérapie, mais englobe l’éducation, la prévention, la participation citoyenne et le soutien communautaire. « Investir dans la santé mentale des enfants, c’est investir dans l’avenir de la société », affirme le rapport. Plus qu’une simple étude, ce document est un appel à agir dès maintenant pour prévenir la souffrance psychique et bâtir des environnements favorables à l’épanouissement émotionnel et mental des générations futures.

L’équipe de rédaction de Mon-Psychotherapeute.Com regroupe des professionnels passionnés et expérimentés dans le domaine de la psychologie, de la psychothérapie et du développement personnel. Nos rédacteurs sont dédiés à fournir des articles informatifs et des ressources précieuses pour vous accompagner dans votre parcours émotionnel et mental.

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